Licenciement & licéité de la preuve : vers une nouvelle lecture des témoignages anonymes ?

Publié le : 10/04/2025 10 avril avr. 04 2025

Dans un arrêt du 19 mars 2025 (Cass. soc., n° 23-10.136), la chambre sociale de la Cour de cassation poursuit l'affinage de sa jurisprudence sur le droit à la preuve et la licéité des témoignages anonymisés, dans le contexte d’un licenciement pour faute grave.
Les faits : un salarié est licencié pour comportement agressif et intimidant. L’employeur produit deux constats d’huissier regroupant les témoignages de cinq collègues. Problème : ces témoignages sont anonymisés pour le salarié, alors que leur identité est connue du juge, de l’employeur et de l’huissier.
Jusqu’ici, la jurisprudence admettait la recevabilité de témoignages anonymisés à condition qu’ils soient corroborés par d’autres éléments.
Nouveauté : la Cour de cassation admet qu’un tel témoignage puisse être recevable même isolément, dès lors que le juge :
  • vérifie l’indispensabilité de cet élément de preuve ;
  • met en balance les droits en présence (droit à la preuve vs. égalité des armes) ;
  • et s’assure que l’atteinte au contradictoire est proportionnée au but poursuivi.
Autrement dit, le juge civil peut admettre une preuve anonymisée non corroborée si elle est strictement nécessaire à l’exercice du droit à la preuve, dans une appréciation concrète et contextuelle de l’équité du procès.
Cette solution fait écho à l’arrêt d’assemblée plénière du 22 décembre 2023, qui avait déjà reconnu que le droit à la preuve peut justifier une atteinte proportionnée à d’autres droits fondamentaux. Une évolution à suivre de près, tant elle interroge l’équilibre entre sécurité juridique et protection des libertés fondamentales dans le contentieux du travail.
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